Il y a quelques années, des chercheurs de San Diego ont mis 95 requins et 5 dauphins dans une grande piscine et les ont laissé vivre ensemble pendant une semaine. Sept jours plus tard, devinez ce qu’ils ont observé…
Dans la première partie de cet article, nous présentions les personnages de la stratégie du dauphin telle que développée par Dudley Lynch et Paul L. Kordis. Voulez-vous maintenant découvrir la suite de l’histoire…? Et, concrètement, en entreprise, qu’est-ce que ça signifie?
Que s’est-il passé dans la piscine?
Les requins, aveuglés par la menace et ne faisant aucune distinction, s’étaient attaqués entre eux. Après un certain temps, il ne restait plus que quelques requins et les cinq dauphins dans la piscine. Quand les requins se sont mis à attaquer les dauphins, ceux-ci, de nature coopérative, voulaient jouer avec les requins. Mais eux ne voyaient que des ennemis. Les dauphins ont donc essayé diverses méthodes pour démontrer à leurs colocataires qu’ils voulaient seulement jouer. Mais les requins ont continué d’attaquer. Éventuellement, les dauphins ont encerclé les requins. Lorsqu’un d’eux attaquait, les dauphins cognaient leur épine dorsale ou lui fracturaient les côtes. Les requins se sont donc noyés l’un après l’autre.
Saviez-vous que si un dauphin est blessé, on délègue quatre dauphins pour l’accompagner jusqu’à ce qu’il regagne le banc? Le dauphin, c’est l’individu responsable de ses résultats; de ses succès comme de ses échecs. Il est capable de s’adapter, de surfer sur la vague du changement. C’est le leader qui vise à s’épanouir et à aider ses pairs à atteindre le sommet. Il vit dans l’abondance et sait qu’il y en a suffisamment pour tous, tout le temps. Il accueille et adopte consciemment la stratégie la plus appropriée selon la situation. Les requins et les carpes, quant à eux, vivent dans un monde de pénurie, de résistance, dans un univers gagnants-perdants.
Dans cette période de constants changements pendant laquelle la mer est tumultueuse, un important virage est en train de se produire au sein de notre société, de nos entreprises, de nous. Nous sommes à l’ère d’une transformation managériale qui exige beaucoup de flexibilité de la part de tous : les propriétaires, les présidents, les gestionnaires, les employés. Vous devinez ce qui adviendra des entreprises et des cadres en résistance, incapables de s’adapter…
Premièrement, que faire s’il y a plusieurs requins dans votre entreprise?
Vous avez certainement déjà entendu quelqu’un (si ce n’est pas vous-même!) dire qu’il travaille dans un monde de requins! Cet univers où il faut s’attendre à se faire poignarder dans le dos à tout moment, car la vision des requins est : «Pour que moi je gagne, toi tu dois perdre».
Habituellement, c’est la culture organisationnelle qui attire un type de poissons plus qu’un autre ― et si vous n’organisez pas votre culture, c’est elle qui vous organisera! La culture, les valeurs, sont généralement établies par la direction. Si les dirigeants instaurent un climat de confiance qui prône l’innovation, l’entraide et l’intérêt collectif, alors un ménage naturel se fera parmi le personnel en place. Ceux qui véhiculent les valeurs de l’entreprise resteront et les autres quitteront, ou perdront leur emploi. Mais la décision doit provenir des dirigeants. Sans leur appui, le changement sera, disons, ardu, voire impossible.
Souvent, on retrouve les requins dans des secteurs d’activité qui encouragent le comportement du prédateur. Mais ces secteurs seront eux aussi appelés à se transformer.
Les carpes et requins peuvent-ils changer?
La seule chose qui ne change pas, c’est le changement! Bien entendu, tout le monde peut changer, à la condition de bien le vouloir. Ainsi, la carpe évolue en carpe pseudo-éclairée. Puis, la carpe pseudo-éclairée, elle, est le tremplin vers le dauphin.
Il se peut qu’une carpe soit résolue à rester carpe ou qu’un requin refuse de changer, mais ils ont avantage à mieux connaître les dauphins et leur façon de penser. Autrement, ils risquent de faire du surplace et de se perdre dans la mer houleuse. D’ailleurs, quand les requins rencontrent un dauphin, il leur arrive souvent de croire à tort qu’ils ont affaire à une carpe. Dans les organisations, nombreux sont ceux qui croient savoir ce que sont les dauphins, mais qui ne saisissent pas ― ou très peu ― les traits qui leur sont spécifiques. Jusqu’à dernièrement, plus nombreux encore étaient ceux qui ignoraient l’existence de dauphin au sein des entreprises. Comment pouvaient-ils donc en devenir un?
Un requin assez intelligent pourrait comprendre qu’il ne l’emportera pas sur un dauphin ― encore faut-il qu’il le reconnaisse ― et s’ouvrir à la coopération. Nous évoluons depuis des milliers d’années en utilisant un langage et un style de comportement qui encouragent la résistance. C’est ce à quoi les requins sont habitués. Mais un dauphin ne parle pas résistance, il parle le langage du cœur. Ce qui a le pouvoir de déstabiliser et de désarmer un requin, jusqu’à l’aider à changer de perspective, à modifier ses façons de faire, à se permettre d’être, réellement. Mais d’abord, le requin doit vouloir changer. Bien entendu, ce n’est pas le cas de tous les prédateurs, nous vous invitons à relire notre article sur les leaders destructeurs.
Des mécanismes pour dauphiniser
Comment amoindrir l’attitude des carpes et des requins, et optimiser celle des dauphins? Tel que mentionné précédemment, l’entreprise qui restera longtemps a instauré ― ou instaurera ― une culture organisationnelle qui valorise l’intégrité, l’authenticité, la transparence, l’innovation et qui encourage l’initiative. Cependant, en encourageant l’initiative, on peut s’attendre à voir des améliorations et des succès se produire, tout comme des erreurs. Mais soyez rassuré : le micro-onde, la pénicilline, le stimulateur cardiaque et même les chips, ont été découverts grâce à des erreurs! L’erreur est humaine et elle nous permet de devenir meilleurs. Voyons donc l’échec comme une occasion favorable de s’améliorer.
Connaissez les attentes de vos employés ainsi que leurs motivations. Ceci vous permettra de déléguer et de choisir les objectifs de rentabilité conséquemment. Un employé qui atteint ses buts connaît une augmentation de son niveau de bonheur et du sentiment de bien-être. Il ne sentira pas le besoin de rabaisser les autres pour s’élever. Il saura qu’il a le pouvoir de s’élever lui-même.
Assurez-vous d’être équitable. Ayez un code d’éthique, un manuel des normes et procédures, lus et compris de tous. Implantez une rémunération qui encourage le travail d’équipe plutôt que l’individualisme, comme une prime de rendement sur le résultat obtenu par un département, par exemple.
Encouragez les employés à jaser entre eux, à se côtoyer. Lorsque quelqu’un est considéré comme un compétiteur, une menace, le sentiment d’empathie vis-à-vis de cette personne diminue. En fait, en absence d’interactions sociales de qualité, le corps génère un sentiment associé à la punition.
Dauphinisons[1] nos entreprises, privilégions la coopération, l’abondance, l’amélioration continue, la conscience, le bonheur au travail! Et surtout, pensons à ajouter l’ingrédient principal au processus : le plaisir!
Isabelle Vincelette, Experte amélioration organisationnelle et coaching
[1] Expression empruntée à Fletcher Peacock dans Arrosez les fleurs et non les mauvaises herbes.